Ce blog rassemble pour l'essentiel mes textes parus dans la presse suisse romande, notamment dans l'Impartial/l'Express, Gauchebdo, le Courrier, Domaine public et le Temps.

31 janvier 2012

Langue de bois à La Chaux-de-Fonds


En haut, sur le plan 1, nous sommes plongés dans le chaos. Bientôt, tout sera ordre, calme et limpidité, comme on le voit sur le plan 2. Tel est le message subliminal qu'essaient de faire passer les autorités chaux-de-fonnières au sujet du projet de réaménagement de la Place de Gare. Pourtant, un examen même rapide du plan 2 permet de constater que le soi-disant "espace piéton" est partagé avec des bus, alors que l'autoproclamé "espace détente" est traversé par des voitures. On sait que les autorités chaux-de-fonnières sont échaudées par le rejet de plusieurs projets d'urbanisme en votation. Apparemment, elles en ont définitivement tiré la conclusion que le peuple est idiot. (source: http://www.placedelagare.ch/circulations.php)

...

Plan 1. Avant transformation. Le chaos.
Plan 2. Après transformation. Ordre, calme et volupté

22 janvier 2012

Ne confondons pas élites et élites.

Christophe Blocher est un politicien qui base ses discours sur la dénonciation des politiciens. Cette contradiction est relevée avec justesse par Yves Pétignat dans son article du 20 janvier, « Les élites, véritables cibles de l'UDC ». Toutefois, M.Pétignat oublie que Blocher n'attaque pas toutes les élites. Il ne critique les dirigeants de l'économie que lorsque ceux-ci sont déjà à terre, comme dans le cas de Swissair ou de l'UBS. La vision de l'UDC n'est donc qu'en apparence anti-élitaire et vise en réalité à un affaiblissement de l'Etat en vue de renforcer, justement, le pouvoir des élites économiques. C'est par pure démagogie ce parti prétend s'en prendre aux plus puissants, alors qu'en réalité il est le pire ennemi des plus faibles. Une démagogie dont Yves Pétignat, par son analyse insuffisamment approfondie, se fait le complice malgré lui.
Envoyé au Temps

18 janvier 2012

Rendons justice à Bonhôte !

Avez-vous déjà entendu parler de chômeurs qui continuent à toucher leurs indemnités après avoir retrouvé un emploi ? Oui. Il s'agit de gens bien connus : les conseillers communaux ou conseillers d’État à la retraite. Il y a pourtant des exceptions. L'Impartial et l'Express du 13 janvier 2012 nous apprennent que Pierre Bonhôte, ancien conseiller communal socialiste à Neuchâtel, se sent discriminé parce qu'il n'a touché que 49 mensualités. Ne croyez pas qu'il a perdu sa rente à cause de l'emploi fort bien payé qu'il occupe, celui de chimiste cantonal. Son indemnité était limitée dans le temps parce qu'il a quitté ses fonctions avant 40 ans. Quatre ans, c'est deux fois plus que ce que peut percevoir un chômeur ordinaire, mais c'est évidemment beaucoup moins que la rente à vie que souhaitait M. Bonhôte.
On pourrait remédier à son terrible sentiment d'injustice en supprimant le système de rente à vie. Celui-ci sert soi-disant à aider ses bénéficiaires à se réinsérer, mais alors j'aimerais qu'on explique pourquoi une personne qui a retrouvé un emploi continue à percevoir une aide. Certes, les retraités de luxe des exécutifs ne sont pas tous pourris, car certains reversent leur rente à leur parti, mais ceux-ci pourraient très bien être financés autrement. S'il y avait une votation, les rentes à vie seraient balayées par le peuple. Malheureusement, on ne peut guère compter sur les milieux politiques pour mettre ce sujet sur la table.


09 janvier 2012

Le président a la mémoire Kurth


« La Chaux-de-Fonds et l'Arc jurassien sont bel et bien le berceau de l'industrie horlogère », affirme M. Laurent Kurth (Impar/Express, 7 janvier). Même si le marché du tic-tac est peut-être plus soucieux de bling bling que de vérité historique, on est en droit d'attendre, de la part du président de la Ville de la Chaux-de-Fonds, des connaissances un petit peu plus exactes au sujet de l'industrie de la précision, qu'il a la charge de défendre. N'en déplaise aux adeptes du cocorico, il n'y avait guère que des loups dans nos montagnes au XIIIème siècle, lorsque les premières horloges mécaniques furent construites à l'étranger. Plus près de nous dans le temps, le plus grand horloger de l'Histoire fut sans doute l'Anglais John Harrison (1693-1776). Grâce à des années de travail acharné, ce simple charpentier parvint, au nez et à la barbe des plus grands intellectuels, à trouver une solution au grand problème de son époque : la mesure en mer de la longitude (position sur l'axe est-ouest). Il était nécessaire de savoir l'heure pour déterminer la position du navire en fonction des étoiles, car la terre tourne. John Harrison fut le premier à fabriquer des garde-temps suffisamment précis, qui plus est résistants aux dures conditions de l'océan, évitant ainsi de nombreux naufrages. Il est dommage que ces faits ne soient pas mieux connu en nos terres horlogères. Espérons que le futur Musée d'Histoire saura replacer notre industrie dans son contexte international.

05 janvier 2012

Le Capitalisme, mis en alexandrins.

L'existence de nos démocraties, voire, de plus en plus, leur inexistence, est largement déterminée par la finance, que le grand public, souvent saisi d'une légitime répugnance, comprend si mal. Nous ne pouvons donc que saluer la première œuvre théâtrale de Frédéric Lordon, l'économiste bien connu : « D'un retournement l'autre. Comédie sérieuse en quatre actes et en alexandrins », parue en 2011 au Seuil. Comme le voulait son auteur, la pièce est jouée par de petites troupes dans diverses régions de France. Elle fait à la foi pleurer et rire, offrant un contraste entre le raffinement de la langue classique et la vulgarité du capitalisme. Lorsque le rideau se lève, les banquiers, pris au piège des prêts fantaisistes engloutis dans l'immobilier américain, les célèbres subprimes, sont en pleine panique :
   Des villas somptueuses sont au prix de cabanes, 
   L'immobilier s'écroule, nous passons pour des ânes. 
   Les courtiers ont menti et dans les formulaires 
   Gonflé les revenus, inventé les salaires. 
Pendant ce temps, « le président », dans son palais, ne sait pas encore ce qui se trame. On reconnaît sans peine Nicolas Sarkozy, qui voulait à l'époque faire adopter en France, ne l'oublions pas, le même système qu'aux Etats-Unis, celui qui a amené des millions d'Américains à se faire expulser de leurs maisons :        
   Permettre à tous les gueux d'apporter leur maison, 
   Comme collatéral de leur consommation. 
   Si l'immobilier monte, ils peuvent emprunter, 
   Et ainsi d'avantage encore consommer. 
Comme on peut s'y attendre, un fois informé de la débâcle bancaire, le président n'hésite pas très longtemps :
  Si les tirer d'affaire c'est sauver le système, 
  Et surtout moi avec, pensons-y tout de même. 
On sait ce qu'il advint. Une fois sauvés par l'Etat, les banquiers n'investissent pas pour autant leur argent dans l'économie réelle :
  Quant à moi, je sais bien ce que je dois en faire, 
  Et j'incline à penser que le plus salutaire, 
  Est encore à la Bourse de l'aller investir, 
  Plutôt qu'en l'industrie de le laisser croupir. 
Nous ne dévoilerons pas la suite. Vous avez déjà compris que les banquiers font rimer leurs « bonus » avec le « médius », le doigt d'honneur qu'ils nous tendent...