Ce blog rassemble pour l'essentiel mes textes parus dans la presse suisse romande, notamment dans l'Impartial/l'Express, Gauchebdo, le Courrier, Domaine public et le Temps.

18 décembre 2009

La morale de Merz est-elle vraiment meilleure?


Hans Rudolf Merz tonitrue contre la France, qui « entend utiliser des documents dont la provenance est illégale » (Le Temps, 17 décembre). Tout cela parce que le fisc français, qui veut poursuivre des clients de la succursale genevoise de la banque HSBC, aurait eu connaissance de l’identité des personnes concernées suite au vol, par un informaticien de la banque, d’une liste confidentielle. Mais la colère de notre ministre est-elle vraiment justifiée ? Imaginons que la police, en perquisitionnant en toute légalité le butin d’un cambrioleur, trouve des documents volés qui prouvent qu’une autre personne a commis un meurtre.  M. Merz trouverait-il alors si scandaleux que la police utilise « des documents dont la provenance est illégale » ?
La question se compliquerait un peu dans l’hypothèse, que rien pour l’instant ne démontre, où l’Etat français aurait acheté la liste à l’informaticien de HSBC, se rendant ainsi complice du vol. On pourrait alors se demander si la fin justifie bien les moyens. Mais les banquiers suisses et leur porte-parole au sein du gouvernement, M. Merz, sont-ils vraiment à même de poser cette question de morale, alors même qu’ils sont prêts, pour parvenir à leurs fins, à employer des moyens aussi discutables que l’assistance à l'évasion fiscale de citoyens étrangers ?

Je ne sais plus s'ils l'ont publiée

14 décembre 2009

Legrix tapis dans l'ombre

M.Pierre Hainard, conseiller communal chaux-de-fonnier démissionnaire et candidat au Parlement fédéral, n’est pas un UDC typique. Nombre d’observateurs avertis estiment d’ailleurs qu’il a participé à la création de l’UDC dans le canton uniquement par ambition personnelle, parce que c’était à l’époque la seule façon pour lui d’accéder au Conseil communal, pour lequel ses ex-camarades de parti, les radicaux, n’avaient pas voulu le désigner.
Son image d’UDC modéré et consensuel, encore largement fidèle aux idées radicales, permet à M.Hainard d’être apprécié au-delà des rangs de son parti: au dernières élections communales, plus de 30% de ses voix provenaient de l’électorat non-UDC. Ces électeurs se doutaient-ils alors que leurs voix allaient favoriser l’entrée à l’exécutif de la Chaux-de-Fonds du premier vient-ensuite, M.Jean-Charles Legrix, qui représente l’aile la plus dure et antisociale de l’UDC ? La question est plus importante qu’il n’y paraît, car le scénario pourrait se répéter prochainement. En effet, si les électeurs neuchâtelois propulsent M.Hainard à Berne le 17 janvier prochain, ils le placeront en position idéale pour être réélu en 2011. Rien n’indique alors qu’il ira au bout de son mandat : rappelons qu’il vient de démissionner d’un poste auquel il avait pourtant promis de rester quatre ans. S’il se retire, comme la loi aura changé, cela entraînera alors automatiquement l’élection de son premier vient-ensuite, dont on peut parier qu’il sera comme d’habitude M.Legrix. Avant de voter pour M.Hainard, les électeurs neuchâtelois feraient donc bien de se demander s’ils souhaitent vraiment prendre le risque de favoriser la carrière d’un représentant de l’aile dure de l’UDC…

04 décembre 2009

Une recette faite de bénévolat et de convivialité

Lieu social, le restaurant Ekir à La Chaux-de-Fonds inaugure une nouvelle façon de consommer.
C’est sans doute le meilleur rapport qualité-prix en ville de La Chaux-de-Fonds. Le restaurant Ekir vous accueille tous les midis du lundi au vendredi dans les anciens locaux de l’Association de défense des chômeurs, rue de la Serre 90, à deux pas de la gare. Le repas complet avec la salade, le dessert et la cruche d’eau posée sur la table ne coûte que sept francs pour les adultes et trois francs pour les enfants. Pour ceux qui souhaitent compléter par un verre de vin ou un café, les boissons sont toutes à un franc. Ekir est un lieu ouvert à tout un chacun, sans exception. Les clients qui se sentiraient gênés par les prix trop bas sont tout à fait libres de verser une contribution supplémentaire au moment de l’addition ou de glisser un petit quelque chose dans la boîte prévue à cet effet. A moins qu’ils ne préfèrent se contenter des soirées de soutien organisées de temps à autre, où le repas est à 20 francs.
Etre comme on est vraiment
Le secret tient en un mot : bénévolat. Certains sont là tous les jours ou presque, d’autres ne viennent qu’occasionnellement : ils sont plusieurs dizaines au total. Il suffit d’avoir « du temps et du cœur », que l’on soit débutant ou cuisinier chevronné. Rentiers AI, bénéficiaires de l’aide sociale, chômeurs ou sans-papiers font la cuisine, le service ou le nettoyage aux côtés de gens plus aisés, sans aucune différence de traitement. Peu importe que tous n’aient pas le même rythme de travail. Tous bénéficient d’un repas gratuit les jours où ils travaillent, mais viennent avant tout chercher le contact humain et le plaisir de donner quelque chose.
Programme d’insertion
Si le rendement n’est pas la préoccupation essentielle d’Ekir, cela n’empêche pas certaines personnes de faire preuve d’une efficacité et d’un sens des responsabilités remarquables, alors qu’elles sont rejetées par le marché de l’emploi, voire même considérées officiellement comme incapables de travailler. Elles expliquent ce paradoxe par l’absence d’obligations, l’absence de hiérarchie et le droit d’aller à leur propre rythme : « Ici, on peut être comme on est vraiment, pas comme dans la vraie vie ». Le plaisir de voir immédiatement le résultat de son travail est également invoqué, par opposition à ces usines où l’on fabrique des composants dont on ne sait même pas à quoi ils vont servir. Ekir est donc en quelque sorte un programme d’insertion autogéré. Là encore, le rapport qualité-prix est imbattable, car il n’y a pas besoin de salarier le moindre travailleur social, ce qui contribue également à renforcer l’attrait du lieu pour les gens qui ont des problèmes d’insertion. Ici, on n’est pas un « dossier » à traiter, mais simplement un collaborateur dont le travail est reconnu et apprécié et auquel les clients sont redevables.
Avis aux amateurs
Dans cette association sans comité et sans hiérarchie, chacun a son mot à dire à l’assemblée, où entre dix et vingt personnes planifient chaque mercredi soir le travail de la semaine suivante. Le menu hebdomadaire est ensuite largement diffusé, afin que les clients puissent choisir le jour dont le menu les allèche le plus. Le vendredi est le jour des spécialités, qui sont aussi variées que les origines géographiques des cuisiniers. Les bénévoles d’Ekir ne se contentent pas de faire de la restauration mais cultivent également un jardin, d’où ils tirent une partie de leurs légumes. Les murs de la salle à manger, qui accueillent pour l’instant les toiles de Samuel Müller, sont prêts à s’ouvrir à d’autres artistes. En soirée, Ekir abritait également un cybercafé encore très récemment, mais les locaux se sont finalement révélés inadaptés. Il y a donc de la place pour de nouvelles activités, avis aux amateurs.
Une grande ambition
Pourtant, la survie à long terme d’Ekir n’est pas encore complètement assurée. En effet, si le prix payé par les clients pour le repas couvre l’achat de la nourriture, l’association dépend pour son loyer de soutiens au coup par coup. Les négociations avec les autorités chaux-de-fonnières en vue d’une subvention permanente sont toujours en cours. Paradoxalement, le dossier est plus avancé avec la ville voisine, Le Locle, qui semble disposée à verser quelques milliers de francs par année à un restaurant social qui ne se trouve pourtant pas sur son territoire. Une ouverture d’esprit admirable qui permettra peut-être à Ekir de réaliser une de ses plus grandes ambitions : baisser le prix du repas…